Matti Tarkkonen à Heinola en 1983
Motocross-history : Quels sont vos premiers contacts avec une moto ?
Matti Tarkonnen (MT) : J'ai vécu à côté du vieux circuit d'Hyvinkaa, où le Grand Prix de Finlande 250cc avait lieu chaque année depuis 1965 et jusqu'en 1985. J'y ai passé des heures entières, mais je ne faisais que regarder, car je n'ai pas eu de moto avant mes 17 ans. C'est à cet âge là que j'ai pu m'acheter ma première moto. C'était une vielle CZ 360 de 1965 !
Vous souvenez-vous de votre première course ?
MT : Oui, c'était l'année d'après, en 1973. J'avais 18 ans et je pilotais ma "nouvelle" CZ 360.Elle datait de 1970. C'était sur le circuit de motocross de Kuusantoski. J'ai terminé neuvième.
Quand a eu lieu votre premier Grand Prix ?
MT : J'ai participé à mon premier Grand Prix, en 1974. C'était en 250cc et c'était à Hyvinkaa bien sûr ! Je roulais sur une CZ fournie par l'importateur finlandais de la marque. J'étais tellement content de m'être qualifié pour ce Grand Prix, que j'en étais nerveux avant le départ de la première course. Finalement, je m'en suis plutôt bien sorti en terminant à la treizième place. Malheureusement je n'ai pas terminé la seconde manche à cause d'un problème mécanique. Après la course, j'espérais que je pourrais recommencer à participer à d'autres Grands Prix le plus tôt possible !
Combien de saisons de GP avez-vous disputé ?
MT : Malheureusement, seulement trois complètement : 1980, 1981 et 1983.
En 1982, après deux GP, vous êtes 3è au général, est-ce que vous vous êtes dit, cela va être une grande saison ?
MT : Oui. J'étais en bonne condition physique et un Belge, Lucien Tilkens, a modifié ma Yamaha standard en une moto nettement plus compétitive, surtout par rapport aux motos d'usine. Le premier Grand Prix s'est déroulé à Payerne et j'ai terminé deuxième au général. Le suivant a eu lieu en Espagne et j'ai fini deuxième à une seconde de l'Allemand Rolf Dieffenbach. J'étais très confiant avant la seconde manche. J'ai pris un bon départ, j'étais troisième après le premier tour, quand quelqu'un m'a heurté fort par l'arrière. Je suis tombé sévèrement et plusieurs motos m'ont roulé dessus. Les premiers secours m'ont amené à l'hôpital car j'étais inconscient. Heureusement j'ai survécu sans aucune blessure aux ligaments, ni fracture. Le week-end d'après, je gagnais le cross inter de Saint Cécile les Vignes !
Juste après, il y a eu la première épreuve du championnat de Finlande et je m'y suis cassé la clavicule. Le docteur a posé une plaque en titane et trois semaines plus tard, j'étais de retour en Grand Prix ! C'était à Mill, pour le GP des Pays-Bas. Après la course, je suis allé dans un hôpital en Belgique et ils ont vu que j'avais une mauvaise infection à l'épaule.
Le Docteur Derweduven a de nouveau opéré mon épaule et a retiré la plque. J'ai été obligé de me reposer à l'hôpital pendant une semaine. Ils m'ont soigné avec beaucoup d'injections d'antibiotique contre l'infection.
Tout ceci s'est déroulé en milieu de saison près un début très prometteur. J'ai réussi à marquer quelques petits points lors des derniers Grands Prix, ce qui m'a permis de terminer encore dans les dix au classement final.
Matti blessé en 1982
Vous avez été près de remporter une manche de GP en 1980, "à la maison". Auriez-vous pu l'emporter ?
MT : J'ai vraiment fait de mon mieux, mais Kees Van der Ven était dur comme un roc, solide. Je me suis battu jusqu'au dernier virage, mais je n'ai pas réussi à la passer.
Vous avez scoré de gros points lors des Grands Prix de Finlande, n'étiez-vous qu'un spécialiste du sable ?
MT : Non, toutes les surfaces me convenaient. J'ai d'ailleurs réalisé de bonnes manches en GP. Cognac (2è en 1981), Gallarate (3è en 1981), Payerne (2è en 1982) et Barcelone (2è en 1982).
Quels étaient vos circuits favoris en Finlande ?
MT : L'ancien circuit d'Hyvinkaa.
Avez-vous décroché des titres nationaux ?
MT : Oui, 2 titres. Je suis double Champion de Finlande en 250cc en 1981 et 1983. Cette année-là, je suis aussi vice-champion en 500cc. En tout j'ai obtenu 9 médailles entre 1977 et 1984, lors des championnats de Finlande.
Matti Champion !
La frontière avec l'URSS était proche, avez-vous couru derrière le rideau de fer ?
MT : Oui, mais heureusement, je n'y ai couru que deux fois. En 1976, il y eut une rencontre entre la Finlande et l'URSS à Leningrad et en 1981, le GP 250cc à Leningrad également.
Comment était l'ambiance ?
MT : Pour moi l'ambiance générale était assez déprimante, mais les supporters et les pilotes étaient très sympathiques, comme dans tous les pays du bloc de l'est.
Revenons en Europe occidentale, quels étaient vos circuits favoris ?
MT : J'aimais bien les circuits rapides en herbe, comme Gaildorf, Frauenfeld, Payerne, etc...Concernant les circuits français, c'est difficile de citer mes pistes favorites parce que je les aimais presque toutes ! J'ai toujours aimé l'ambiance de ces courses en France. J'en profite pour adresser mes remerciements à tous ces motoclubs qui nous ont toujours accueillis et qui ont usé de tous leurs efforts pour organiser ces cross inter.
Matti Tarkkonen lors du cross inter de Verdun en 1981
Avez-vous couru hors d'Europe ?
MT : Oui. J'ai couru quatre fois le Grand Prix des Etats-Unis à Unadilla. C'était dur ! Les Américains étaient rapides et les conditions météo éprouvantes (+42° en 1980). Malgré cela, j'ai réussi à marquer des points là-bas aussi.
Avez-vous couru en supercross ?
MT : Non
Avez-vous essayé les courses sur glace ?
MT : Oui juste pour m'amuser. J'aimais bien cela car on pouvait piloter gaz en grand pendant presque un tour !
Avez-vous roulé à la Novemberkasan ?
MT : Non, je n'ai jamais roulé en enduro.
Que faisiez-vous durant les longs hivers ?
MT : Je travaillais comme bucheron et ouvrier dans la construction et je m'entraînais physiquement. il était hors de question de rouler en motocross.
Avez-vous été pilote d'usine ?
MT : Non. Cependant en 1980, j'ai eu la chance de rouler quelques grands Prix avec une Yamaha usine. Celle de Neil Hudson, à cause de ses problème de contrat. Ils amenaient la moto uniquement sur les Grands Prix. Du coup je ne pouvais pas m'entraîner avec, ni faire de testing. Pour toutes les autres courses, j'avais ma moto standard.
Avez-vous pu vivre de votre passion ?
MT : Non. L'argent que je gagnais grâce aux courses était juste suffisant pour financer la saison. En plus je devais travailler dur chaque hiver pour me faire assez d'argent pour recommencer une nouvelle saison de courses.
Quel métier avez-vous exercé après votre carrière ?
MT : J'ai arrêté ma carrière en 1984 car j'avais galéré lors des deux précédentes saisons sans mécanicien. Et puis quand je me suis aperçu que je n'aurais pas le financement pour une nouvelle saison, j'ai décidé de me retirer.
J'ai crée ma propre école de motocross entre 1985 et 1990. En même temps, je m'occupais du développement et du marketing des produits chez l'équipementier de motocross Tackla. Puis en 1991, j'ai fondé une société avec ma femme, Sirpa : Innovation Sports Finland. Nous avons importé les genouillères CTI ainsi que d'autres produits orthopédiques pendant 15 ans. Nous avons vendu notre société en 2006 et maintenant je suis responsable du marché finlandais pour un gros fabricant de matériel orthopédique et prothétique, Ossur.
[photos : archives Matti Tarkkonen avec son aimable autorisation]