M H : Comment êtes-vous entré dans le monde de la moto ?
Gert Krestinov (GK) : Mon père était un ancien pilote de Grand Prix, il roulait dans l'équipe d'Union Soviétique. C'était très important, car il était estonien et il appartenait à l'équipe soviétique. Quant il a arrêté sa carrière professionnelle, il m'a offert une petite moto 50cc et j'ai commencé à m'entrainer et à rouler.
Quand avez-vous roulé sur une moto pour la première fois ?
GK : En 1993, j'avais 3 ans !
Donc vous avez commencé très jeune ! ?
GK : Oui, effectivement. C'était sur mon circuit à la maison. C'était très amusant, car je roulais très doucement, je cherchais mes parents du regard et je leur demandais si tout ce que je faisais était bien !
Vous souvenez-vous de votre première course ?
GK : Oui, c'était en 1994 à Saku, un circuit de sable. J'ai terminé douzième. Je ne me souviens plus des courses, mais je n'étais pas très confiant, plutôt excité !
Avez-vous décroché un titre national ?GK : Oui plusieurs. Les principaux en catégorie MX1 en 2009 et 2015.
Quels sont les meilleurs circuits d'Estonie ?
GK : Il y a beaucoup de bons circuits. Mon préféré est Tihemetsa.
Tihemetsa, c'est le club où enseignait l'ancien pilote Sulev Saar ?
GK : Oui, c'est là où il a commencé à rouler et s'entrainer, puis il y a crée un club.
L'avez-vous déjà croisé ?
GK : Oui, je l'ai rencontré. Il vient aussi sur des courses de championnat d'Estonie et je discute avec lui.
Et quels sont vos circuits favoris en Europe ?
GK : Actuellement, je participe au championnat anglais, donc je connais bien ces circuits. Celui qui me plait est Canada Heights.
Pourquoi participez-vous au championnat anglais ?
GK : Parce que j'ai un grand team derrière moi, il m'aide beaucoup et m'offre de bonnes conditions financières.
Présentez-moi votre team ?
GK : Le nom du team est "Phoenix Tools Apico Honda ". Il est basé dans le sud de l'Angleterre. Le patron s'appelle Barry Moore et mon mécano, Karl Upsher.
Quelles sont les caractéristiques de votre moto ?
GK : Nous utilisons une Honda 450 CRF modifiée. Cette moto est vraiment très bonne et nous rajoutons quelques pièces spéciales pour l'améliorer. Nous voulons la rendre rapide mais aussi maniable et facile à piloter.
Participez-vous également au championnat anglais de supercross ?
GK : Non, je me concentre juste sur le motocross
Vous participez aux deux championnats, Estonie et Angleterre ?
GK : Oui si le calendrier le permet, je participe aux deux championnats. Mais cette année, il y a eu des courses les mêmes week-end.
Plusieurs années auparavant, vous avez vécu une autre expérience à l'étranger, aux Etats-Unis ?
GK : C'était cool ! Grâce à mon sponsor j'ai rencontré Jim Holley, qui m'a aidé pour l'organisation de ce voyage et la participation à l'Outdoor de Glen Helen. Je n'ai pas marqué de points (28ème et 23ème), mais je m'étais qualifié, ce qui était déjà un super résultat, car je n'avais que seize ans !
Auriez-vous pu y rester pour réaliser une carrière ?
GK : Les Etats-Unis auraient été formidables, mais il faut être bon en supercross et je n'en n'avais jamais fait. Sans supercross, vous ne faites pas partie d'un team et il faut un sponsor privé.
Retour en Europe, 2008 est l'un des meilleurs moments de votre carrière : le Grand Prix de Belgique MX2 ?
GK : Oui, c'était cool. Je ne me souviens pas d'avoir été fatigué après les courses. Le fait de mener la course m'a donné un coup de boost. Le travail venait de payer et c'était incroyable !
Quel fut votre sentiment d'être sur la plus haute marche du podium ?
GK : C'était tellement agréable : acquérir une certaine renommée, avoir son nom gravé sur la scène mondiale, voir mon père présent. Je pense que ce fut le meilleur moment en motocross pour moi.
Cette même année, vous remportez le prix "Jan de Groot". Quel était cette récompense ?
GK : Cela récompensait le meilleur jeune de l'année.
Pourquoi avez-vous décidé de participer à la saison complète de GP MX3 en 2013 ?
GK : Je roulais déjà au Royaume-Uni et j'ai eu l'opportunité de disputer l'ouverture du championnat du Monde. Comme j'ai gagné cette épreuve, mes sponsors m'ont donc aidé un peu plus pour me permettre de rouler toute la saison.
Une victoire en Grand Prix, une place finale hors du podium : était-ce une bonne saison ?
GK : C'était bien. J'ai obtenu ma deuxième victoire en GP, mais terminer quatrième au final n'était pas l'objectif. La médaille aurait été géniale !
Aujourd'hui, êtes-vous déçu de ne pas participer à la totalité du championnat du Monde ?
GK : Je suis triste de ne pas pouvoir rouler à tous les Grand Prix, car le système est comme cela. C'est difficile pour un pilote de s'en sortir et vous devez être une superstar, sinon vous perdez beaucoup d'argent. Les circuits doivent être plus naturels aussi, mais c'est le côté commercial des GP qui veut cela. Bien sûr, tous les pilotes qui y participent sont vraiment bons, mais je pense que je mérite de prendre part à un peu plus de Grand Prix. C'est juste difficile de trouver de l'argent.
Que pensez-vous de l'évolution du motocross de nos jours ?
GK : Les Grand Prix sont bien, mais je pense que cela pourrait être tellement mieux s'il y avait plus de pilotes de différents nationalités qui y participaient. Les courses seraient beaucoup plus suivies dans tous ces différents pays.
Il y a moins de cross inter qu'avant, arrivez-vous à gagner votre vie ?
GK : Il y en a encore quelques uns, surtout en France. En quelque sorte, vous devez gagner votre vie, donc quand je peux participer à des cross inter, je le fais et je le ferais tant qu'il y en aura, c'est mon métier. Actuellement, je peux gagner ma vie en participant à des courses au Royaume-Uni, donc je continue. En France, j'ai roulé cette année à Lacapelle-Marival, Thomer la Sogne et Sainte-Austreberthe. Concernant les deux dernières courses, ce sont deux types de circuits et de courses différents et j'apprécie les deux. Les deux motoclubs gèrent bien leur organisation.
Vous avez participé à plusieurs Motocross des Nations, quel sentiment cela procure t-il de courir pour son pays ?
GK : C'est un événement spécial, une fois par an. Cette année, je n'étais pas dans l'équipe, qui était très bonne avec un top 10 final. C'est très bon pour l'Estonie, qui n'est qu'un petit pays d'1 300 000 habitants. Et pour y participer de nouveau, je ferais tous les efforts aussi longtemps que ce soit possible.
Pensez-vous que l'Estonie puisse organiser le Motocross des Nations dans les années à venir ?
GK : Ce serait génial, on pourrait trouver un endroit, si quelqu'un finance, pourquoi pas ? Ce serait intéressant à coup sûr pour notre petit pays.
Qui seront les prochains top pilotes estoniens ?
GK : Nous avons de bons pilotes, mais cela dépend aussi de leur éthique dans le travail et de leurs finances. Nous verrons, mais pour quiconque veut réussir, il devra donner 100% et travailler pour cela.
Quel est votre entrainement ?
GK : En ce moment je veux juste retrouver un corps physiquement fort et je vais commencer à rouler en Janvier, car j'ai eu une blessure assez sérieuse à l'épaule et j'ai besoin d'être bien soigné avant de me donner à 100% sur la moto.
Quelles sont vos forces ?
GK : Ma vitesse dans les virages et l'endurance.
Savez-vous environ encore combien d'années vous comptez rouler ?
GK : Je voudrais courir encore cinq ans et être compétitif.
Avez-vous une idée de ce que vous souhaitez faire après votre carrière ?
GK : Je ne suis pas sûr, il n'y a rien de prévu. J'aimerais bien transmettre mes conseils et mon savoir-faire à un jeune pilote.
Avez-vous vu votre père rouler ?
GK : Je l'ai vu en Estonie seulement, quand il l'a fait pour s'amuser. Auparavant il était professionnel pour l'équipe d'Union Soviétique, ce qui était déjà une grande réussite.
Est-ce qu'il vous aide aujourd'hui ?
GK : Oui, c'est ma fondation. Nous discutons tous les jours.
Parlez-vous du motocross des années 80 ?
GK : Oui nous en parlons. Je suis vraiment intéressé par l'histoire du motocross.
Comment c'était le motocross en URSS dans les années 80 ?
GK : C'était un travail difficile, un gros effort. Les motos n'étaient pas très bien entretenus et vous n'aviez qu'une moto pour toute la saison de GP.
Nous terminons par les vacances. Qu'en en prenez-vous quand vous êtes un pilote professionnel ?
GK : Vous devez tout gérer par rapport au temps, donc plutôt en fin de saison. Cette année, comme je me suis blessé, j'ai pris un peu de temps quand j'ai eu mon opération en Septembre.
Quel est votre pays favori pour vous reposer et partir en vacances ?
GK : Mon pays préféré est l'Estonie, mais si je pars en vacances, j'aime les destinations chaudes. Jusqu'à présent j'aime San Francisco.
Merci Gert et bonne saison 2018 ! Tänan teid Gert ja hea perioodi 2018 !
Palmarès
2009 : Champion d'Estonie MX1
2015 : Champion d'Estonie MX1
2008 : vainqueur du Grand Prix de Belgique MX2
2013 : vainqueur du Grand Prix des Pays-Bas MX3