Q : Avez-vous
roulé aux Etats-Unis ?
R : Oui.
Husqvarna voulait se faire connaître là-bas.
L’usine a donc décidé de m’y envoyer en pensant que c’était une bonne idée. Je
me suis dit que cela serait une bonne opportunité pour se rendre aux
Etats-Unis. J’ai reçu l’accord de l’usine 3 semaines avant le décollage.
J’avais déjà voyagé en avion, mais jamais aussi loin et l’aéroport de Stockholm
devait faire 1/10è de celui de Los Angeles ! J’étais un peu perdu, quand
Edison Dye, l’importateur Husqvarna aux Etats-Unis, n’était pas au rendez-vous.
Il me dit que j’ai un jour d’avance ! L’usine n’avait pas pensé au
décalage horaire ! Je prends un avion pour San Diego mais il ne peut
atterrir à cause du brouillard. Après quelques jours de repos, il était temps
de faire mes débuts en course sur le sol américain.
Au moment de
quitter la Suède, je ne savais pas quelles épreuves j’allais disputer, mais
certainement plus que la « Dirt Digger » car la SVEMO (Fédération
Suédoise) m’avait autorisé à m’engager n’importe où je le souhaitais. Nous
sommes donc allés au nord de la Californie pour disputer une course à Corregeanville. C’était la 1è fois que je
voyais un désert et ça m’a beaucoup fasciné. Je me sentais comme dans un autre
monde !
La pluie commença à
tomber fort quand nous nous dirigeâmes vers le départ. Parpleu ! Je
croyais que la Californie était gorgée de soleil et je n’avais emmené que
quelques tee-shirts pour rouler !! Nous étions environ 200 à 250 sur la
ligne de départ, quand ma moto n’a pas voulu démarrer au 1er coup de
kick. J’étais bon dernier ! Mince, comment allais-je faire de la publicité
pour Husqvarna et moi-même ! Qu’importe ! J’ai remonté tous les
pilotes sauf un après quelques tours. Déjà je pouvais voir les traces du leader,
mais j’ai mis un bon moment avant de me trouver derrière ce pilote BSA, qui
était Dick Mann !! Mon but était de le suivre puis de le dépasser dans les
3 derniers tours. Finalement j’ai changé d’idée, j’ai roulé le plus vite que
j’ai pu, je l’ai dépassé et j’ai gagné avec une avance confortable !
Beaucoup de personnes étaient impressionnées mais personne n’avaient fait
attention à ma moto ni à moi-même.
J’ai roulé au
« Dirt Digger GP », qui était la plus grande course pour moi lors de
cette tournée. Je me suis dit que je devais faire aussi bien qu’à Corregeanville.
J’ai gagné les deux catégories 250 et 500. C’est cette épreuve qui m’a fait
connaître aux Etats-Unis. Personne ne croyait que l’on pouvait rouler aussi
vite sur une moto en motocross.
A la fin de mon
séjour, j’avais couru 9 courses et gagné les 23 manches auxquelles j’avais
participé !
Rencontres américaines : James Stewart, Raquel Welch et Dean Martin
Q : Comment
était l’ambiance derrière le rideau de fer ?
R : Mes
voyages en Union Soviétique ont toujours été très fascinants ! Je me
souviens que tous les étrangers qui devaient courir à Moscou étaient accueillis
à la frontière où nous devions rencontrer 4 membres du moto club. Les problèmes
commençaient aux douanes où cela prenaient des heures et des heures pour
accorder notre visa, déclarer l’argent que nous avions dans chaque monnaie et
quelles affaires vous ameniez. Ils voulaient tout savoir sur la moto : le
n° du moteur, des cadres, le nombre de pièces de rechange. Il arrivait que
certains d’entre nous oubliaient de déclarer de l’argent dans une monnaie, car
lors de nos déplacements, nous avions plusieurs ! Et bien, ils
n’hésitaient pas à rester 1 ou 2 heures de plus pour retrouver la trace de cet
argent !
Q : Quels
étaient vos circuits préférés ?
R : Imola,
Pernes les Fontaine et Sabadell.
Q : Quel est
votre plus belle course ou souvenir ?
R : J’ai reçu
un fusil Husqvarna de la part de l’usine comme cadeau pour l’importation aux
Etats-Unis des motos de la marque. Ils me l’ont offert quand je suis rentré de
mon voyage en 1966.
Q : Quel titre
mondial fut le plus difficile à décrocher ?
R : Le premier
a été le plus difficile et le plus nerveux.
Q : Quel était
votre sentiment d’être sélectionné pour le Motocross des Nations ?
R : Fier !
Q : Quel est
votre meilleur souvenir lors du Motocross des Nations ?
R : Aucun. Je
n’y ai jamais eu de chance !!
Q : Vous avez
roulé dans le stade d’Helsinki, commet était-ce ?
R : Il y avait
un grand stade au centre d’Helsinki utilisé d’ordinaire pour les épreuves
d’athlétisme et parfois d’équitation. Ils y ont dessiné un beau circuit à
l’intérieur qui débordait même sur l’extérieur. Il y avait quelques buttes d’un
côté du stade. Je pense que ce fut la première course en stade jamais
organisée.
Q : Que
pensez-vous de l’évolution du motocross ?
R : J’aime
regarder les courses mais je préférerais que les Grands Prix aient lieu sur des
pistes naturelles comme avant. De nos
jours, il y a trop d’ornières, certaines très profondes. La nature des terrains
est souvent trop souple quand le circuit est artificiel.
Q : Comment
expliquez-vous qu’il n’y a plus de Suédois, Champions du Monde de motocross ?
R : Cela
demande beaucoup de sacrifices d’être un top pilote et on dirait que personne
ne veuille travailler dur et rouler.
Torsten Hallman, fier du travail accompli et de ses trophées
Q : Vous êtes
également reconnu pour votre carrière dans les affaires, pouvez-vous nous en
dire quelques mots ?
R : Après les
glorieuses années du démarrage, beaucoup de nouveaux concurrents sont arrivés
sur le marché de l’équipement en motocross. Des sociétés qui avaient connu notre
développement sont arrivées avec leurs idées. Nous avons commencé par l’importation
de pantalons de cuir à l’ancienne. Puis les américains sont devenus plus
rapides en piste et plus importants dans le milieu. Ils ont voulu leur propre
look, leurs propres équipements, leur propre identité. Hallman Racing a
continué à se développer pendant cette période et a introduit sur le marché des
produits innovants notamment la « Protection Collection ».
A part le
motocross, je suis devenu le distributeur exclusif en Suède pour Yamaha de
leurs motos, cyclomoteurs, motoneiges et moteurs hors-bord, après le fantastique
travail de développement que j’avais réalisé pour le programme de la Yamaha YZ
et du système de suspension Monocross.
Parallèlement
j’étais l’importateur exclusif des motos KTM, des lunettes, VTT et vêtements de
ski Scott, des casques Bell et Giro etc…et même concessionnaire Volvo dans la
banlieue de Stockholm. Dans les années 90 j’étais impliqué dans une quinzaine
de sociétés. Pour les amateurs de motocross, je suis également reconnu pour
avoir développer avec Sten Lundin la Yamaha HL500 4 temps pilotée par Bengt
Aberg en 1976 et 1977.
Q : Préférez-vous
le football ou le hockey sur glace ?
R : Je suis
les deux sports et quand j’étais jeune je les pratiquais tous les deux.
Q : Avez-vous
vu la finale de la Coupe du Monde 1958 Suède-Brésil ?
R : A l’époque
j’avais 16 ans et je jouais dans une équipe de football. La meilleure de la
région ! Et bien sûr, j’ai vu cette finale, mais à laTV !
Q : Quels
étaient vos passions pendant votre carrière et après ?
R : Pendant ma
carrière je n’avais pas de temps pour faire autre chose que du motocross.
Maintenant j’ai du temps pour jouer au golf et regarder d’autres sports et bien
sur aller voir quelques Grands Prix et des supercross aux Etats-Unis chaque
année. Tout récemment, je suis allé voir le Monster Energy Million Dollar Race
à Las Vegas !
Photos
: archives T.Hallman avec son aimable autorisation.